Attention à la fixation de la valeur d’un bien d’une personne publique en cas de cession avant la fin d’un bail emphytéotique

Retour sur un arrêt intéressant du Conseil d’Etat du 13 septembre 2021 (CE 3/8 ch.-r., 13-09-2021, n° 439653) concernant la fixation de la valeur d’un bien d’une collectivité en cas de cession de ce bien avant la fin d’un bail emphytéotique : 

Une commune avait conclu en 1962 un bail emphytéotique pour une durée de 60 ans pour la mise à disposition auprès d’un exploitant touristique d'un ensemble de terrains en vue de la construction et de l'exploitation d'un village de vacances, stipulant qu'à son expiration, la commune acquerrait la propriété des constructions édifiées par l'emphytéote sans avoir à lui verser d'indemnité. 

La commune a décidé de vendre au preneur du bail les terrains concernés avant la fin de la durée contractuelle du bail. Le Conseil d’Etat indique dans ce cas, que s’il est bien possible pour la commune de renoncer au droit d’acquisition des constructions édifiées par l’emphytéote, il est toutefois nécessaire de prendre en compte la valeur d’une telle renonciation dans le cadre de la fixation du prix de vente. Et ce, en vertu du principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant des fins d'intérêt privé. 

En l’occurrence, le Conseil d’Etat a annulé la délibération de la commune actant de la cession des biens de la commune, les membres du Conseil municipal ne disposant pas d’information concernant la valeur de l’indemnité représentative de cette renonciation au droit d’accession aux propriétés édifiées. L’avis du service des Domaines ne comportant par ailleurs pas non plus d’éléments sur ce point car se contentant d’évaluer les terrains d’assiette dans le cadre de la cession envisagée.

La lecture de cet arrêt nous rappelle bien le principe même d’un bail emphytéotique, à savoir la mise à disposition de terrains à un emphytéote qui disposera de droits réels sur ces terrains et ce pour une redevance modeste, avec en contrepartie pour la collectivité bailleresse, l’acquisition à titre gratuit au terme du bail des constructions qui ont été édifiées sur les terrains. Il est donc logique qu’en cas de renonciation à cette acquisition par la collectivité, une valorisation de cette renonciation à l’acquisition des constructions soit incluse dans le prix de vente. 

Lien vers l’arrêt du Conseil d’Etat